L’importance de l’apprentissage précoce d’une seconde langue – Compte rendu d’une conférence donnée par le Professeur Dalgalian

18 juillet 2010
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à l’initiative d’Eltern Alsace -

L’éduction bilingue renforce la maîtrise de la langue primaire (langue maternelle),

Le bilinguisme est un apport pour le calcul exact (mathématiques),

Un bilingue précoce est un plurilingue en herbe.

La précocité se définie par l’apprentissage et la maitrise d’une seconde langue avant l’âge de 7 ans.

Il faut qu’un enseignement bilingue soit précoce, car cela est plus formateur pour le cerveau humain. C’est parce que l’enseignement bilingue est précoce qu’il est efficace et qu’il ne se réalise pas au détriment de, mais bel et bien au bénéfice de l’enfant et de la langue primaire (maternelle).

Ce n’est pas le nombre d’heures en français qui permet une écoute de la langue, mais l’intérêt que l’on donnera à l’enfant de la langue.

Si cela n’avait pas été le cas, l’éducation nationale n’aurait jamais favorisé l’introduction de classes bilingues (breton, basque, alsacien, …).

Il est prouvé qu’un enfant bilingue précoce apprend une 3ème langue plus facilement qu’une personne qui apprendrait cette même langue en tant que seconde langue car, il a déjà tous les mécanismes nécessaires à se corriger.

Le bébé humain

Pour comprendre l’importance du bilinguisme, il est nécessaire de comprendre le paradoxe de l’homme. En effet, un bébé humain a, à la naissance, 100 milliards de neurone et aucun savoir faire pour sa survit  (situation paradoxale). C’est, de toutes les espèces de vivant sur Terre, le seul a ne pas savoir se débrouiller au bout de quelques heures / jours. La période d’apprentissage des fondamentaux chez l’homme dure environ 7 années (marche, lecture, écriture, …). Cette durée correspond à la fin de maturation du cerveau, c’est-à-dire à la fin des associations / connexions synaptiques.

Après cette durée, l’environnement prend le dessus sur la « dictature » du gène.

100 milliards de neurone, c’est 100 milliards de potentialité et l’environnement transforme ces potentialités en savoir et savoir-faire.

Il faut comprendre que l’homme arrive au monde avec une ouverture universelle et qu’il construit un filtre sonore (spécialisation de l’oreille) aux sons de la langue maternelle. Dans ce cadre spécifique, apprendre, c’est éliminé et réduire ses possibilités. On peut donc dire qu’un adulte est un « malentendant sélectif ». Il est donc nécessaire de faire une rééducation de l’oreille lorsque l’on souhaite apprendre une langue après 7 ans.

L’importance de l’oral

L’Homme s’est construit sur l’oral et l’écrit est très récent dans l’histoire de l’humanité. Sur une échelle de temps, c’est comme si c’était hier.

Cependant, en peu de temps, l’écrit qui permet de poser les choses est une « perte de l’expressivité individuelle orale ». En effet, l’Oral est le socle de la construction langagière car c’est à l’oral que l’on construits les automatismes de l’expression, la créativité phonologique, la gestion morphosyntaxique, … qui permettent les échanges aussi bien dans le discours qu’à l’écoute (compréhension).

Le langage a donc une double inscription : neuronale et sociale.

Les aires du langage dans le cerveau sont : Aire de Broca et Aire de Wernicke. Nous avons une et une seules aire de Wernicke et une à plusieurs aires de Broca en fonction que l’on parle une ou plusieurs langues.

Aire de Wernicke = elle intervient dans la perception des mots et des symboles du langage (gestion des automatismes linguistiques = structure des phrases, conjugaisons, accords, …).

Aire de Broca = est impliquée dans la composante motrice du langage, dans la production et l’articulation des mots. Elle élabore le programme moteur qui permettra de mettre en mouvement, de façon coordonnée, tous les éléments anatomiques nécessaires à leur prononciation.

Le cerveau de l’enfant bilingue précoce (avant 7 ans) est capable de faire une coopération neuronale dans la zone de Broca  à contrario de l’enfant bilingue tardif (après 7 ans).

Pourquoi faut-il un vécu ?

L’apprentissage d’une langue est très exigent car cela met en œuvre car c’est elle nécessite la mise en œuvre de l’intellect et de l’affect. Le psychomoteur accompagne cet apprentissage (parler, entendre, geste, ..). La sollicitation est importante pour s’imprégner de la langue et renouveller l’intérêt de l’enfant.  Cela veut donc dire qu’un bon apprentissage nécessite un vécu de la langue.

On apprend une langue en la vivant et en étant actif
=> l’IMMERSION est l’une des meilleures mises en application de cet axiome.

L’impact de l’environnement

Il y a 3 situations :

  1. La famille
  2. L’école
  3. La vie sociale

A – La Famille

C’est elle qui transmet le désir de l’éduction bilingue. Si elle n’est pas vecteur d’envie du bilinguisme, si elle ne contribue pas aux mises en conditions, alors l’impact environnementale sur l’enfant s’en trouvera dégradé.

B – L’école.

L’école seule ne suffit pas à l’apprentissage de la langue. Il lui faut des relais extérieurs pour que l’enfant se rende compte de l’intérêt de la langue et de son utilité (sport, musique, …).

Il y a une complémentarité dans les réseaux bilingues (Eltern Alsace versus ABCM Zweisprachigkeit)

Il faut se doter de l’excellence pédagogique pour rendre l’école attrayante, intéressante et non pas élitiste, c’est-à-dire :

  • Horaires suffisants
  • Utilisation des technique nouvelles (texte, image, échange, …)
  • Une transdisciplinarité scolaire pour percevoir l’utilité de la langue apprise
  • Etablissement d’une parité horaire

L’enfant projette constamment du sens dans ce qu’il fait afin de se définir dans son environnement. Puis, il réalise des essais et des erreurs, se rectifie et recommence jusqu’à ce qu’il comprenne comment améliorer sa performance et enfin acquérir la compétence. C’est le cas pour la marche, par la dextérité des gestes et pour le langage. On peut donc résumer que l’enfant réalise constamment un travail d’approximation optimisant (chercher, se tromper, corriger, …).

Ce processus d’apprentissage est utilisé par l’enfant, et l’adulte, pour toutes les nouvelles choses à acquérir. Cela veut donc dire que l’expérience est nécessaire et beaucoup plus enseignante que la délivrance d’une solution toute faite.

Les méthodes actives / standards doivent être combinées aux nouvelles technologies qui apportent le même signal d’information (lecture / écriture / son).

Donc, il faut que l’enfant ait du temps de recherche afin d’acquérir les compétences futures.

C – La vie sociale.

Il faut privilégier les activités dans la langue dite faible (théâtre, sortie, music, …).

Il faut aussi utiliser les médias comme vecteurs de la langue (Télévision, cinéma, internet, …).

Pour que l’enfant développe son intérêt pour la seconde langue, il faut qu’il ait la perception de l’utilité sociale de cette langue. L’environnement est capital pour soutenir l’enseignement bilingue.

Et l’Alsace ?

Parler Alsacien, ce n’est pas se compromettre publiquement ni politiquement, c’est avant tout mettre en avant la richesse et la spécificité de la région. Enfin, si l’on porte un regard objectif sur qui parle Alsacien, on constante que les générations d’avant guerre et celle d’après guerre parlent Alsacien, mais que les enfants de cette génération ne le parle plus.

L’Alsace est une situation particulière au bilinguisme qui a été relancé de la France. En effet, de part son histoire, elle est la dernière et la plus frileuse à relancer son bilinguisme et à la transmission de sa langue. Pourquoi ? Certainement parce qu’au travers des derniers siècles, on lui a demandé de ne plus parler Français, mais allemand, de ne plus parler allemand, mais français et ce, plusieurs fois. Et qu’aujourd’hui, on lui demande de parler alsacien, français et allemand. C’est ce que l’on appelle aujourd’hui le « traumatisme alsacien ». De ce fait, l’Alsace est aujourd’hui dans une course contre la montre pour la sauvegarde de sa langue Alsacienne.

Et pourtant, 100 millions de personnes parle allemand. C’est la première langue de locuteurs natifs en Europe !

Le bilinguisme est un réel atout régional. Pourquoi vouloir systématiquement demandé aux parents allemands qu’ils développent cet atout ?

Les atouts de l’Alsace sont qu’elle est une région idéalement géo localisé, que sa culture est très fortement imprégnée de la culture germaniste et qu’enfin, le marché du travail demande, voir exige, l’utilisation de la langue allemande. Ce manque d’intérêt voir rejet de la langue allemande et alsacienne fait que désormais, l’Allemagne va recherche, sur le marché du travail, un Tchèque ou un Hongrois !

Il est fort de constater que les parents mono lingues sont les plus fervents défenseurs du bilinguisme et qu’ils confient l’appropriation de la langue à la génération suivante car ils peuvent assurer la transmission de la langue. Le bilinguisme alsacien est le reflet d’un souci du présent et de l’avenir et absolument plus un problème alsaco-alsacien.

Une langue sauvegardée : Seul la langue basque aujourd’hui peut prétendre à sa survit car 57% des écoles primaires proposent un cursus bilingue. Ce cursus représente 40% des élèves basques. Ce n’est pas encore le cas pour les Bretons et encore moins pour les Alsaciens qui représentaient à la rentrée scolaire 2009/2010 à peine 10%.

Notes diverses

  • Il n’y a pas de discrimination à l’âge de 3 ans. Seules les capacités d’apprentissage de l’enfant sont mises en œuvre.
  • Un blocage n’est jamais un problème linguistique. Il se situe toujours ailleurs (social, physique, psychologique, …)
  • La logique mathématique n’est pas la logique pédagogique et encore moins la logique bilinguiste.
  • La dyslexie est une pathologie écrite, non orale.
  • ABIBAC : sélection élitiste de l’éduction nationale.
  • L’anglais est incontournable mais pas indispensable pour apprendre une langue.

Bibliographie

Jean Pierre CHARGEUX, « L’homme de vérité », 2002

Jean PETIT, « L’immersion, une révolution », 2001

Gilbert DALGALIAN, « Enfances plurilingues », 2000

Gilbert DALGALIAN, « Reconstruire une éduction ou le désir d’apprendre », 2007

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